CNV et Argent – Les bases de l’argent en Communication Non Violente

Partages de Marshall Rosenberg au sujet de l’argent, lors d’un atelier de Communication Non Violente (vidéo en anglais sous-titre français).

Traduction et sous-titres réalisés par Filipé

Marshall Rosenberg :

Et bien, parfois, ne pas avoir d’argent était dur.

Par exemple, je voulais faire des interventions au Moyen-Orient, je voulais offrir notre formation aux Israéliens et Palestiniens, mais je n’avais pas l’argent. Comment vais-je me rendre là-bas ?
Alors, je vais chez Swiss Air, je parle girafe avec le manager, je lui dis:  » Je parie que si vous saviez le type de travail que je fais, et que vous avez des sièges libres dans votre avion, je parie que vous aimeriez me donner une place gratuite dans l’avion. »

Et la personne me dit : « Hein ? Je pense qu’il vaut mieux que vous voyiez mon supérieur ».

Donc, je vais voir son supérieur et je dis : « Je parie que vous me donnerez avec plaisir une place inoccupée si vous saviez le type de travail que je souhaite faire ».

Il dit : « Quel type de travail souhaitez-vous faire ? »

Je lui ai dit et il me répond : « Que penses-tu si je te propose cela : vous formez notre équipage et on vous donne la place ».

J’ai dit : « J’aime cette idée, mais pouvez-vous me donner la place en premier car je suis pressé de démarrer mon travail ? »

Il a dit : « Pas de problème »

Alors, j‘ai eu plein de places pour faire mon travail, sans le moindre argent.

Tout le monde en était content à ce sujet, sauf un jour, où une dame était assise à côté de moi dans l’avion et quand l’hôtesse de l’air m’a vu assis là, à lire mon journal, en attendant que l’avion décolle, elle vient me voir et elle dit : « Où est votre girafe ? » (Elle avait été à une de mes formations où j’utilise des marionettes de girafes)

La dame à côté de moi commence à chercher, apparemment, elle n’a pas l’habitude d’entendre cette question.

Je dis, je réponds honnêtement : « Elle est dans le compartiment à bagages avec mon loup ».

Un participant : « Je me sens un peu divisé au sujet de l’argent. D‘un côté, c’est une bonne stratégie pour satisfaire ses besoins,  d’un autre côté, je ne veux pas prendre le risque de mettre ma vie en danger.
Pouvez-vous nous donner un conseil, sur comment vous avez appris à percevoir l’argent entre ces deux aspects ?

Marshall Rosenberg : »Oh, c’est facile, oui. »
Laissez-moi vous faire un exercice rapide sur la manière d’utiliser l’argent d’une manière girafe (CNV).

Trois points : 

• Ne PAYER jamais avec de l’argent, pour quoi que ce soit !
• Ne FACTURER jamais d’argent pour quoi que ce soit.
• Et transformez le concept de VALEUR : ôtez-vous cela de la tête, qu’une chose ‘VAUT’ une certaine somme d’argent.

Donc, débarrassons-nous du mot ‘PAYER » => On ne veut plus jamais ‘PAYER’ avec l’argent, ne payez jamais, pour quoi que ce soit => Donnez de l’argent :donnez-le pour être au service de la vie d’une manière dont vous voulez la servir.

Deuxièmement, ne facturez jamais de l’argent pour quoi que ce soit que vous faites, ne facturer jamais d’argent, demandez de l’argent aux gens pour vous aider à faire le travail que vous souhaitez faire.

Ne dites jamais « Je ne vous donnerais ce que je fais, et qui a de la valeur, que si vous me payez en argent ».

Ne dites jamais aux autres : « Je vous donnerai quelque choses, qui pour moi à de la valeur, seulement si vous me payez en argent » => Je serais heureux de vous donnez ce que j’ai à offrir et j’aimerais que tu me donnes de l’argent afin que je puisse continuer à le donner aux autres.

La traductrice : elle voudrait que vous répétiez car elle n’a pas totalement compris.

Par exemple, une femme m’a téléphoné, elle m’avait été adressée par son docteur (le docteur avait connaissance d’un livre que j’avais écrit sur les enfants qui ont des problèmes d’apprentissage), son enfant avait des problèmes à l’école, et elle était morte de peur, elle dit : « Donc… »

J’ai dit au téléphone : « C’est Marshall Rosenberg qui vous parle »

Elle dit : « Mon docteur m’a orientée vers vous et j‘aimerais vous parler de mon fils qui a des problèmes à l’école »

J’ai dit : « Très bien, quand voulez-vous venir ? »

Elle a dit : « Heu…, Heu…avant que je dise ça… j’ai besoin de vous poser une question »

Marshall Rosenberg : « Quelle était la question ? » 

Les participants : « Combien ça coûte ? »

Voulez-vous vivre dans ce monde, où les gens meurent alors qu’ils sont transférés d’un hôpital vers un autre, après avoir eu un accident car ils n’avaient pas assez d’argent pour le premier, et sont donc envoyés vers un hôpital public

Voulez-vous vivre dans un monde où l’argent est utilisé de cette façon ?

Donc, ne facturer jamais en argent… Ne faites rien pour de l’argent. Clarifier bien cela

Obtenez de l’argent pour faire ce que vous voulez faire. Vous voyez la différence ?

Faites les choses qui vous permettre de vivre votre besoin de sens et ensuite, obtenez l’argent que vous avez besoin pour faire cela. Mais ne faites jamais rien pour de l’argent, la vie est trop courte.

Donc, je sollicite de l’argent, je ne facture pas,.

Je donne de l’argent pour aider les gens à faire ce qu’ils veulent faire. Si ce qu’ils font enrichit ma vie, j’ai envie de leur donner de l’argent pour qu’ils continuent à donner cela à d’autres.

Une participante : « J’ai une question pratique car je ne comprends pas bien cela et je ne peux pas le traduire d’une manière qui fasse sens pour moi. Je travaille en freelance pour une entreprise qui produit de vitamines qui sont vraiment très bonnes, elles m’apportent vraiment une bonne santé et je veux vraiment parler de cela à tout le monde. Mais je ne peux pas donner ces choses en cadeau à tout le monde, je dois aussi payer ces choses, les acheter.
Je ne peux pas aller voir l’entreprise et dire : j’ai besoin de ces produits car je veux aider quelqu’un, je vois ma tâche et… montrer toutes les choses que l’on peut accomplir avec cela.
Je donne la possibilité à tout le monde de les obtenir aux mêmes conditions de prix que moi.

Mais quand quelqu’un dit qu’il veut cela mais qu’il ne veut pas le faire de cette façon. Il doit payer car je ne peux pas… vous savez… Comment dois-je faire ? Je peux expliquer comment c’était pour moi. Je peux lui dire le bien que ça lui fera.

Marshall Rosenberg : 

Voici ma prédiction, quoi que vous fassiez, si ça sert la vie et je peux voir que tu es confiante que ça sert la vie, donc, je dirais à cette personne : « J’entends les problèmes que vous avez, je crois vraiment que ces pilules vont vraiment améliorer votre santé, j’aimerais vous les donner et je peux vous les donner car d’autres personnes qui en ont bénéficié m’ont donné de l’argent pour que je puisse continuer à les donner à d’autres. Donc, j’aimerais savoir si vous seriez heureux de me donner de l’argent afin que je puisse continuer à les donner à d’autres personnes. Mais avant que vous ne répondiez à ma question, pouvez-vous me dire ce que vous venez d’entendre ? »

Ce que l’autre personne peut dire : « Êtes-vous mentalement malade ? »

Marshall Rosenberg : « Je suppose que c’est la première fois que vous avez cet échange sur l’argent ? »

L’autre personne : « C’est bizarre ! »

Alors, ça pourra peut-être me prendre trois heures avant que l’on puisse clarifier cela.

C’est un concept radicalement différent.

Dans un des endroits où je séjourne chez un particulier, à San Diego en Californie, la femme avait accepté de gérer mon planning pendant quand je travaille, et alors, je lui ai demandé, quand des gens appellent pour des séances privées, de prévoir un rendez-vous d’une heure.
La deuxième fois que j’y suis retourné, j’ai vu que chacun de mes rendez-vous faisait 2 heures.

J’ai dit : « Annie, pourquoi deux heures ? Je t’ai demandé une heure »

Elle a dit : « La dernière fois que tu étais là, j’ai remarqué que ça te prenait une heure pour voir la personne, et une heure pour lui clarifier comment tu utilises l’argent. »

Mais mon expérience a été que quand les gens comprennent vraiment cela, ils me donnaient généralement 40% de plus que ce que je demandais. Mais plus important, ils avaient plaisir à me le donner, car ils pouvaient voir que je ne pouvais le leur donner seulement car les gens me donnaient assez d’argent pour voyager, me donnaient de l’argent pour faire ce que j’avais besoin de faire.

Donc, ce n’est pas facile de parler de cela avec les personnes

Je travaillais avec une entreprise en Suisse, un des directeur m’a invité pour parler d’un travail que je pouvais faire avec eux, et pendant que j’étais dans le bureau à parler avec ce directeur, il a dit : « Super ! J’ai envie que vous fassiez ce travail. Combien facturez-vous ? »

Et alors j’ai expliqué que je ne ‘facturais’ pas et que je serais heureux de vous dire ce que j’aimerais recevoir et j’aimerais savoir si vous auriez plaisir à me le donner et s’il y a un conflit, je suis sûr que nous pouvons résoudre cela.

Il a dit : « Je savais que vous diriez quelque chose comme ça ! Quand je vous ai entendu à mon église, j’ai pensé que vous diriez quelque chose comme ça et j’aime vraiment ça, mais dans cette entreprise, si je vais voir mon supérieur, ils voudront juste savoir combien vous facturez, je ne saurais pas comment leur expliquer cela ! ».

J’ai dit : « Regardes, je vais vous dire ce que j’aimerais, et si vous voulez que je vienne pour le faire, quelque soit la manière dont vous voulez gérer l’argent dans votre entreprise, c’est votre affaire. »

Il a dit : « Ok, ok, qu’aimeriez-vous ? »

Je le lui ai dit.

Il a dit : « Oh, c’est un problème ! Si je vais voir mes supérieurs, et que je leur dit ce que vous voulez, ils vont croire que vous ne valez rien car la plupart de nos consultants demandent trois fois plus ».

J’ai dit : « Regardes, si vous voulez me donner trois fois ça, je le prendrai, mais j’ai besoin que vous sachiez que je ne fais jamais rien pour de l’argent : je pourrais le faire sans argent pour votre entreprise parce que d’autres personnes me donnent de l’argent. »

Alors ils m’ont donné trois fois ce que je sollicitais.

Mais certaines personnes qui n’ont pas d’argent, me demandent de leur donner de l’argent pour qu’ils puissent bénéficier de mes services.

Donc, dans beaucoup des pays où je vais, parfois les gens aimeraient que je leur donne de l’argent, pour qu’ils puissent venir aux ateliers et nourrir leurs familles. Car s’ils viennent à mon atelier, leurs familles ne vont pas manger ce jours-là.

Ainsi, en Sierra Leone, je donne aux gens l’argent pour venir à l’atelier et je peux le faire parce que des personnes dans d’autres pays me donnent de l’argent.

Donc, ne faites jamais rien pour de l’argent, faites ce qui vous permet de vivre votre besoin de sens et demandez l’argent que vous avez besoin pour faire cela.

Comment c’est, quand j’ai reçu quelque chose qui est précieux pour moi et que je voudrais donner quelque chose en retour, mais je ne peux pas donner de l’argent en retour et que je ne sais pas non plus ce que l’autre personne aurait envie d’avoir ?

Oui, j’ai souvent cette conversation avec les gens, quotidiennement.

Ils veulent me donner ce dont j’ai besoin pour continuer mon travail mais ils n’ont pas d’argent. Et bien, il y a beaucoup de choses qu’ils peuvent faire pour mes besoins autrement qu’en me donnant de l’argent.

Donc, je leur dis simplement ce qu’ils peuvent faire pour mes besoins, on pourra trouver une manière quand c’est le cas.

Mais parfois, ce dialogue crée beaucoup de douleur pour les gens.

Une fois, une femme m’a dit, dans un atelier : « Tu sais, je n’ai tout simplement pas d’argent, Marshall, c‘est pourquoi je ne te donne pas d’argent ». 

J’ai dit : « Ok »

Et durant la pause repas, nous allons sur le parking, j‘avais une toute petite voiture et elle avait une très grande voiture. Bien sûr qu’elle n’avait pas d’argent, cette voiture coûtait probablement tout ce qu’elle avait chaque mois.
Et, il se trouve que ma voiture était juste à côté de la sienne.

Et elle m’a regardé.

Et je l’ai regardé.

Et on a eu une franche rigolade.